DROIT immobilier - avant-contrat

Promesse synallagmatique

La promesse synallagmatique de vente est le contrat par lequel une personne promet de vendre un bien à une autre personne qui s’engage à l’acquérir à un prix et à des conditions déterminés. L’acte constate les engagements réciproques et symétriques des parties. À la promesse ou à l’engagement de vendre du propriétaire répond exactement la promesse ou l’engagement d’acquérir de son cocontractant.

Le vocable de « compromis » ou « compromis de vente » est souvent utilisé dans le public, et même par de nombreux professionnels, pour désigner indistinctement soit la promesse synallagmatique, soit la vente sous condition suspensive. Il s’agit d’un emploi impropre du terme de « compromis » qui, dans son acception strictement juridique, correspond à la convention bien particulière, régie par le Code civil (art. 2059 s. ), par laquelle deux personnes décident de soumettre à l’arbitrage d’un tiers la solution d’un litige qui les oppose. C’est la raison pour laquelle ce terme sera ici évité.

Les juristes utilisent pour qualifier la promesse le terme technique et juridique de « synallagmatique ». Cet adjectif caractérise des obligations réciproques et interdépendantes. On peut parler plus simplement et tout aussi exactement de « promesse réciproque », de « promesse bilatérale » ou de « promesse de vendre et d’acquérir ».

Une terminologie rigoureuse est rarement respectée en pratique. Les vocables utilisés ne correspondent pas toujours à la nature de l’avant-contrat, que seule une démarche de qualification, s’appuyant sur l’ensemble du contrat, permet de déterminer.

Pour distinguer les parties à ce contrat de celles qui contractent une promesse unilatérale et qu’on désigne « promettant » et « bénéficiaire », il est suggéré d’utiliser les vocables de « promettant vendeur » et de « promettant acquéreur ». Ces termes permettent par ailleurs de distinguer les parties engagées dans une promesse synallagmatique de celles liées directement par une véritable vente sous conditions suspensives, et qu’il est légitime de désigner respectivement « vendeur » et « acquéreur ».

L’objet de la promesse synallagmatique est de préparer les éléments essentiels et structurants de la vente convenue par les parties. Ce qui distingue la promesse synallagmatique de la promesse unilatérale, dont l’objet est également de préparer la vente, c’est qu’ici la manifestation de volonté d’aucun des protagonistes n’est plus nécessaire pour former la vente : ceux-ci ont chacun promis de la conclure et de la réaliser, et cette promesse est assortie de l’irrévocabilité et de la force obligatoire des contrats.

La vente, malgré la réciprocité et la symétrie des engagements des parties, peut cependant ne pas être certaine. C’est le cas lorsqu’elle est subordonnée à la réalisation d’une ou plusieurs conditions suspensives ; mais cette incertitude est alors l’effet du jeu de la condition et ne résulte pas de l’exigence du consentement de l’une des parties.

Les consentements des parties seront exprimés dans l’acte notarié constatant la vente, mais il s’agira d’un consentement réitératif.

La distinction entre la promesse synallagmatique de vente et la vente elle-même est délicate. Cela tient largement aux termes de l’article 1589, alinéa 1 du Code civil qui dispose que la promesse de vente vaut vente « lorsqu’il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix. » Il est tentant, à la lecture de ce texte, de conclure que la promesse de vente est la vente elle-même, au point de douter même de la distinction entre les deux figures contractuelles.

Cette lecture de l’article 1589, alinéa 1, qui peut se nourrir également des articles 1582 (définition du contrat de vente) et 1583 du Code civil (perfection de la vente), a conduit une partie de la doctrine ancienne à assimiler la promesse de vente à la vente. Cette assimilation repose sur le syllogisme suivant : la vente est formée par la rencontre de deux consentements convergents portant sur une chose et sur un prix. Or, la promesse de vente contient cet accord sur la chose et sur le prix ; donc, la promesse de vente est une vente. La dénomination de « promesse » donnée par les parties à leur convention serait indifférente à la qualification de l’opération, qui serait en réalité une vente.

Deux considérations permettent de nuancer cette analyse et d’affirmer l’existence et l’originalité de la promesse synallagmatique par rapport à la vente elle-même. L’une est d’ordre psychologique, l’autre d’ordre juridique et historique.

Même si les effets des engagements souscrits sont en principe identiques, ce n’est pas la même chose de dire « je vends, j’achète », que de dire « je promets de vendre, je promets d’acquérir ». Le contrat de promesse intègre une prise en compte de la donnée temporelle : en promettant de vendre et d’acquérir, les parties s’obligent actuellement et irrévocablement à réaliser une opération de vente dans le futur. La promesse synallagmatique révèle la volonté des parties de réaliser l’opération contractuelle en deux étapes distinctes : la promesse elle-même et la vente ultérieure. Ni le caractère obligatoire de la promesse, qui tient au fait qu’il s’agit d’un contrat, ni l’exécution forcée qu’autorise l’article 1589, alinéa 1 du Code civil, ne permettent de la réduire à une vente mal qualifiée.

Ensuite, l’article 1589, alinéa 1 n’exprime pas que la promesse « est » la vente, mais qu’elle la « vaut ». La règle énoncée, si on s’attache à son origine historique, a pour objet non pas de régler une question de formation de la vente, mais de résoudre une difficulté d’exécution d’une promesse de vente : dès lors que sont réunis les éléments nécessaires à la formation de la vente que sont les consentements réciproques sur la chose et sur le prix, les engagements souscrits par les promettants ont la même portée qu’une vente, et peuvent notamment faire l’objet d’une exécution forcée, qui aboutit à la réalisation de la vente même si l’une des parties est défaillante et refuse de réitérer son consentement. À la sanction de l’inexécution au moyen de dommages-intérêts, les rédacteurs du Code civil ont préféré celle de l’exécution forcée.

Si la promesse synallagmatique de vente est aussi sûre que la vente elle-même, par l’exécution forcée dont elle peut comme celle-ci faire l’objet, cela ne permet pas d’en déduire pour autant qu’il s’agit de deux opérations juridiques identiques.

Par ailleurs, si au stade de la promesse la vente est incontestablement formée en raison de la convergence d’accords sur la chose et sur le prix, affirmer l’existence et l’originalité d’un contrat de promesse distinct de la vente ne conduit pas à nier cet effet, et le fait que la vente soit formée n’évince pas la notion de promesse et n’en épuise pas les effets.

En outre, la distinction entre la promesse synallagmatique et la vente elle-même doit d’autant plus être affirmée que les dispositions de l’article 1589, alinéa 1 du Code civil ne sont pas d’ordre public : les parties peuvent y déroger, en souscrivant une promesse « ne valant pas vente ».

Enfin, si la reconnaissance d’une certaine autonomie conceptuelle de la promesse synallagmatique de vente n’a pas de véritables incidences pratiques, elle a le mérite cependant de rendre compte de ce que les parties ont véritablement voulu et convenu : s’engager actuellement et irréversiblement sur une vente qu’elles réaliseront plus tard.

La promesse synallagmatique de vente est le type d’avant-contrat qui convient aux parties, promettant vendeur et promettant acquéreur, qui souhaitent constater une opération de vente sur les conditions de laquelle elles sont d’accord, et dont elles souhaitent que la bonne fin ne dépende plus d’un consentement ou d’une manifestation de volonté ultérieur de l’une d’elles.

Le fait que les parties ne réalisent pas directement la vente tient généralement à la nécessité pour elles de subordonner la perfection de leur convention à la réalisation de conditions suspensives : notamment, vérifications effectuées par le notaire de la régularité du droit de propriété et de la situation hypothécaire, obtention d’une autorisation administrative ou d’un financement par l’acquéreur.

Le fait que les engagements du promettant vendeur et du promettant acquéreur vaillent vente entraîne comme conséquence que tant que la promesse n’a pas trouvé son issue – exécution ou résolution – les parties se trouvent engagées dans les liens d’une vente. Cette force de la promesse est parfois considérée comme un inconvénient par le promettant vendeur qui, en cas de défaillance de son cocontractant, ne peut pas conclure une vente avec un autre acquéreur tant que la promesse n’a pas été résolue, conventionnellement ou judiciairement.

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